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  • Photo du rédacteurAttika Lesire

Massada, calcaire rouge sang

La forteresse de Massada fut le lieu de la tragédie. L'un des suicides collectifs que dénombre l'histoire de l'Homme.

L’archéologie est une science interprétative, je précise donc par souci de transparence que j'ai

choisi de n'évoquer que la piste principale, la plus romanesque, rapportée par Flavius Josèphe, même si des variations historiographiques existent.


" -Voilà, c'est ici". On me montra du doigt la forteresse.


C'est un immense caillou au milieu du désert. On croirait voir les bras d'un ange céleste qui portent la montagne de roche aux nues tant elle surplombe tout, la Mer Morte et le désert de Judée. Que peut-on vraiment faire d'autre face à ce caillou, que de retenir son souffle ?

Toute, absolument toute la frontière qui sépare l'ordinaire de l'extraordinaire se trouve pourtant bien là : dans la respiration.

Je reprends alors mon souffle comme pour me ressaisir de ma chair humaine chancelante face au magnétisme de l'Eternel. Le nouveau né le sait déjà : il abreuve ses poumons dès les premières secondes de sa vie.

Massada est l'un de ces endroits sur Terre capable d'engloutir votre respiration.


Comment croire qu'autre chose que la main de Dieu ait pu ériger ce complexe palatial de fortifications antiques perchées sur un tel socle de pierre ? Et pourtant.

Il est ici un espace qui ne puisse être le théâtre que de la puissance ou du drame : la tiédeur y est tout simplement absente.

Je porte mon mouchoir déjà péniblement imbibé au front, il n'y a rien à faire.

Cela tombe bien, les tièdes sont vomis dans le Royaume des Cieux.

Je crois percevoir les échos des hurlements d'hommes résonner dans ses cavités vertigineuses élevées sur les flancs. L'histoire du peuple juif semble bien y avoir traversé les abîmes.





La forteresse de Massada prit vie entre 37 et 15 avant Jésus-Christ, lorsque le Roi Hérode aménagea la construction en rempart. Il le voulait un refuge inatteignable, une cachette contre les menaces. L'architecture témoigne toujours des sentiments de ceux qui bâtissent. En levant les yeux, on se languit de la sécurité et du confinement que présage ce château dans le ciel. Avec les prunelles d'un enfant qui découvre sa première cabane.

Mais c'est pour ce qui s'y est passé en 66 de notre ère, que Massada a basculé hors du temps.


La domination Romaine est aux portes de la Judée. Au début de la Grande Révolte contre les Romains, un groupe de rebelles juifs, les Sicaires du parti nommé Zélotes, vinrent se réfugier en la forteresse de Massada, qui avait été désertée depuis la mort d'Hérode. En 70, ils furent rejoints par d’autres Juifs et leurs familles, expulsés de Jérusalem. Ils sont alors 980.

"Armés d'un poignard, ils avaient coutume d'assassiner leurs compatriotes suspectés de collaboration avec l'occupant ! On les avait surnommés pour cette raison « sicaires », du latin sica, qui signifie poignard." *

Une troupe particulièrement combattive face aux persécutions.


Les Zélotes jouissent alors d'un lieu inaccessible des Romains, qu'ils voient passer comme de toutes petites fourmis ouvrières. Les citernes qui amassent l'eau de pluie et ses tonnes de provisions alimentaires permettent plusieurs années d'autonomie aux réfugiés.

Hélas un jour, des Romains les yeux rivés vers le ciel découvrent le pot au rose. Les Zélotes sont repérés.


Inattaquable

Inaccessible pour tout être vivant, c'est ainsi qu'Hérode pensa la forteresse. A un seul endroit la roche prête à une ascension pénible. Appelé le Sentier du Serpent, à cause de son étroitesse et de ses nombreux détours, il tournoie tout autour du flanc, coupé là où les escarpements font saillie, revient souvent sur lui-même, donnant la sensation d'une vaine progression. Tout homme qui suit ce chemin doit s'appuyer alternativement sur chaque pied, car la mort le guette ; de chaque côté s'ouvrent des gouffres qui peuvent glacer d'effroi les plus braves.

Une géomorphologie arride. Mais peu à peu, les Romains s'amassant sont à présent 8000. L'infanterie, résolue, dut donc trouver une autre solution pour frapper efficacement l'ennemi confiné.



“La patience a beaucoup plus de pouvoir que la force.”
Plutarque

Sept mois interminables

Sept mois. C'est le temps qui leur fallu pour élaborer leur plan et le mettre à exécution.

Plongeons nous du côté des Zélotes. Qu'a bien t-il pu se passer pendant tout ce temps, dans leur esprit, spectateurs d'une déferlante qui se jouait méticuleusement ?

La géographie des lieux, le désert, rendent impossible toute fuite.


Et finalement, le dessein ressemblait à peu près à ça : une gigantesque rampe sur laquelle un bélier pouvait enfin être posé, puis lancé à toute allure avec une tour d'assaut.

Elle fut achevée au printemps 73.

Au milieu d'une nuit, celle du 2 au 3 mai, le destin va se sceller.



Un dernier combat désespéré

Pourtant. En pénétrant dans la forteresse avec un bélier, ils découvrent 960 cadavres.

Bébés, vieillards, femmes.


Comme le judaïsme interdit le suicide, on pense que les habitants se sont divisés par groupes de dix (ou par famille ?), ont tiré au sort pour s’entretuer. Dans chaque groupe, un Zélote va tuer tous ses compagnons et ainsi de suite, jusqu’au dernier.

Mais surtout. En baissant les yeux au sol, des tessons, avec des prénoms en Hébreux. Ils de sont signés, avant de mourir.





Plutôt morts qu'esclaves

Avec eux, la Palestine juive tombe.

"Flavius Josèphe nous dit qu’ils étaient environ mille au moment du siège. Hommes, femmes et enfants. Des noms inscrits en hébreu sur des tessons ont été retrouvés. Ils semblent confirmer, pour certains archéologues, le fameux discours qui y fut tenu et qui validerait le scénario du suicide collectif des assiégés pour éviter la mort de la main des Romains."



 



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